Il était une fois Palyrme…
Il était une fois Khaled al-Assad
Dans l’âcre
Odeur
Des poudres expiatoires ;
Dans l’épaisse
Poussière
Des nuages vengeurs,
Les yeux rougis,
La gorge irritée,
Le faciès déformé
Par d’odieux ricanements,
Bêtes et jubilatoires,
Ils renient leur histoire
À grands coups
D’explosions,
Ravageuses et pensées.
Bâtons de dynamite,
Destructeurs de culture,
Esquisses dans les cieux,
Trop sinistre arc-en-ciel,
De funestes présages :
Guerres et conquêtes,
Viols et pillages !
Voilà donc
Qu’à Palmyre,
Antique cité romaine,
Agréable oasis
Au cœur du désert,
L’auguste temple
De Baalshamin
A vu se déployer
Au-dessus de ses pierres,
Et colonnes encore debout,
Les ailes effrayantes
Des Anges des Ténèbres,
Assombrissant l’horizon
De leur dévastatrice vision,
Imposant, par la force
Et l’outrage, leur croyance,
Obscurantiste et mortifère.
Ô magnifiques vestiges
D’un empire disparu,
Héritage commun,
Maudit soit l’envol
De ces êtres déchus !
Pitoyables augures,
Ils annoncent,
Tapageurs et ignares,
Les méfaits d’autres sbires,
Flanqués
De couteaux, de fusils,
De bombes et de grenades,
Égorgeurs patentés
D’un vieillard humaniste
Décapité. De sang-froid !
À deviner leur cœur
Enflammé par la haine…
À craindre leur esprit
Obsédé par la gloire
De leur dieu vénéré…
À remarquer leur bras
Brandi vers le ciel…
À fixer dans leur main
Leur fatal poignard…
On les sent prêts à tout,
Fiers de massacrer et de tuer
Puis de se sacrifier.
* * * * *
Pareils à des gorgones,
Serpents sur la tête,
Regard pétrifiant,
Semeurs de terreur,
Ils exterminent par conviction
Mais aussi par plaisir,
En abjects bourreaux.
Ils horrifient nos âmes
Et nous font frissonner,
Des pieds à la tête.
Derrière les arguties
De leur pensée sectaire,
Bannissant le passé condamnant
Le sexe, ils cachent
Une quête effrénée
De pouvoir absolu,
D’odieuse dictature
Pour laquelle ils détruisent,
Soumettent et exécutent,
Laissant sur leur passage
Des membres mutilés, des hommes
Torturés, des femmes lapidées…
Tous ces visages tourmentés
D’innocents arrêtés,
D’enfants embrigadés,
D’épouses conspuées
Tous à hurler leur désespoir
Et supplier à genoux
Qu’on les laisse encore vivre,
Comment peuvent-ils
Toujours les regarder
Impassibles, avilis de la sorte
Au nom d’un prophète justicier,
Ordonnateur du chaos ?
Et ces assassinats
Et tous ces meurtres ;
Et ces massacres
Et tous ces infâmes charniers
En vue d’un monde meilleur,
Comment peuvent-ils donc
Sans cesse s’en réjouir ?
À ce point aveuglés et cruels
Qu’ils ne peuvent se dire « homme »
Qu’en répandant du sang humain !
En hommage à Khaled al-Assaad
Directeur des Antiquités Syriennes,
Assassiné le 18 août 2015,
À 82 ans, par Daech.
Palyrme, cité- berceau de tous les dieux : ceux qui brillent à travers les astres qui naissent à l’unisson dans un ciel que partage toute l’humanité ,un firmament certes borné par la volonté des hommes où survolent des oiseaux de fer, de mauvaise augure, qui n’épargnent même pas l’abstrait et l’intangible dans leur pilonnage morbide , mais comme une mère qui épargne aux yeux de son enfant le sang qui coule de ses incommensurables blessures, tout en continuant à lui donner son sein et a lui sourire du sourire de la vie. Et le sang de la mère mêlé à une terre qui soulève une épaisse poussière , mûe par des vents vengeurs ricanant de la souffrance d’une mère qui ne les entend pas tant ses sens sont saisai par le yeux de son enfant qui la regarde dans les yeux, en lui disant par les mouvements de ses pupilles que l’agréable oasis, au coeur du désert, retrouvera son éclat et que même ta mort sera célébrée par les chants du renouveau, le jour où les fossoyeurs de la vie s’ enterreront dans leur propre fosse, signe que la lumière reprend toujours dessus sur les tenants, soit la nuit des plus longues. Ils ont jubilé de ta mort, croyant que couper une tête est synonyme de la disparition de l’intelligence. Ils se sont trompés jusqu’à la déraison, juste à cette incommensurable folie qui habitent leur pensée comme un parasite habitant le tronc d’un arabe , suçant sa sève et affamant les rares bourgeons qui résistent à la mort. Leur pensée est un désert où nul verdi ne peut résister. Leur idéologie est comme un puissant vent de sable agressant vallée et pleine, n’épargnant même pas des vergers pourtant encaissés entre d’impénétrables falaises !
Ils ont jubilé à ta mort, oubliant que ton ultime râle n’était pas un cri de soumission, mais un rugissement d’un lion qui a défendu sa dignité contre une meute de chiens affamés , lâches, mais dont le nombre avait fini d’avoir raison d’un corps, mais pas de la symbolique d’un être qui restera lion car né lion et ayant vécu lion. L’autre ,dont la promptitude à dévorer cette millénaire chair sillonnée par tant et tant de meurtrissures, mais toujours dignement irriguée par le sang de la résistance , est synonyme de peur et de lâchete car sachant que la grandeur d’un lion me meurt jamais.
Pareils à des gorgones
Alignés sur un sol à la fécondité proverbiale, terre de civilisations inspirant d’innombrables poètes , d’illustres peintres et nourrissant la culture populaire d’ un pays creuset de tolérance et du vivre ensemble, Palmyre s’érige comme un temple où toutes les prières se disent en communion avec sa population imprégnée par un héritage plus que millénaire et une culture religieuse à la fois tirant son essence du paganisme et du monothéisme. Khaled Al Assad était justement un homme d’une grande érudition qui, dans sa volonté de fer de pérenniser les liens de tolérance liant avec sagesse et beauté les différentes communautés , avait été un gué aux piliers inébranlables sur lesquels marchent toutes les sensibilités religieuses avec paix et amour. Il était comme une agpréable oasis , au coeur du désert où tous viennent étancher la soif du passé auguste et du présent triste que des obscurantistes veulent transformer en cimetière à ciel ouvert. Mais tel un combattant dont le serment est inscrit en lettres de sang sur son corps certes fragilisé par de perpétuelles luttes, mais niant à la mort son droit de lui voler le souffle, il continua à se battre jusqu’à ce que le mot abandon se mue en chant de martyr.
Mort en martyre à l’âge de 82 ans, un âge où la vie se profite sur son ultime sentier, Khaled al Assad était parti pour l’ultime combat de sa vie, celui de défendre la cité interdite à la haine que des haineux ont voulu réduire à néant pour effacer le souvenir et instaurer la sauvagerie sur les la terre arable d’une ville à la fois chaste et féconde : chaste par ses voeux de ne pas salir la virginité d’une histoire inscrite sur le front de l’humanité , féconde du sang des enfants qui se sont sacrifié pour que la laideur ne s’empare de l’étendard de la beauté.